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mercredi 21 mars 2012

Une ville

La fatigue me gagne. Cette longue journée de marche n’en finit pas. Je ne pense plus qu’à poser mon sac et m’asseoir. 

J’atteins le sommet d’une dune. Soudain, un peu au loin, des formes apparaissent. Je pense à un mirage. Je décide de m’approcher. Si je pouvais trouver de l’eau dans cet endroit, comme j’aimerais m’en asperger si un bain n’est pas envisageable. Dans le désert il faut faire attention à l’eau et un bain est un luxe. 


Je m’approche et les contours d’une cité se dessinent puis se précisent. Le soleil se reflète sur du verre qui renvoie de longs traits irisés. 

Trois poteaux de bois assemblés délimitent la porte d’entrée. Un drapeau flotte au vent. Quelque chose y est inscrit mais il tourbillonne sur lui-même et je ne saisis que des lettres : E, N, A. puis une bourrasque me permet de lire NEANT. Pas très engageant. Et si le néant était au bout de cette marche solitaire, cette quête qui l’avait fait tout quitter, ces questions sans réponses, ces désirs sans objets, ces rêves sans corps. 

Un silence pesant m’entoure mais je n’ai pas peur. Cet endroit ne me veut pas de mal. Il me rappelle un autre endroit, en fait d’autres endroits. Mais lesquels? 

La cité semble composée d’une seule rue, comme celle que l’on voit dans les westerns américains. Mais là pas de saloon, pas d’hôtel, pas de prison et pas de sheriff pour m’accueillir. 

Le sale est sans cesse soulevé par l’air chaud. Les maisons qui m’entourent sont aussi disparates que possible. Il y a des constructions très classiques en pierre de tuffeau (cette pierre que j’aime tant et qui me rappelle toujours la douceur tourangelle) décorées de jolis balcons en fer forgé, agrémentées de tour de fenêtre en zinc et de très belles portes en bois. Portes closes à l’étranger il va sans dire. Et puis juste à côté une pyramide de verre, plus petite que celle du Louvre à Paris mais d’une belle taille tout de même. Tout l’intérieur, toute l’intimité y sont dévoilés, les structures de fer, les sols de béton ciré et les portes toujours interdites mais incluses dans les structures. Une maison de bois peint de couleur safran attire mon regard. Elle ressemble à ces toutes petites maisons profondes mais pas larges que l’on trouve sur les côtes du Nord de la France. 

Pas de trottoir, j’avance de plus en plus péniblement dans le sable qui fait office de route. Où vais-je pouvoir m’arrêter? Aucune de ces maisons ne semble vouée à l’accueil de l’hôte de passage. Le néant, quoi. 

J’ai l’impression d’évoluer dans un musée d’architecture où l’on aurait regroupé les diverses sortes de réalisations. 

Et puis voici une église, massive, romane c’est sûr. Sa flèche est d’une hauteur impressionnante. Elle semble se perdre dan le ciel clair. Là encore porte close. Où est la vie? Qui sont ses habitants? Où sont-ils? 

Je n’ai pas l’impression d’être épiée, je ne suis pas oppressée. Et si c’était à moi de donner vie à Néant. 

Le bruit de mes pas est étouffé par le sable. Je me retourne. Une porte d’une maison de pisé à la forme très reconnaissable d’une habitation Dogon bat. Est-ce une invitation à pénétrer? Est-ce pour me chasser de Néant? 

Je suis trop fatiguée pour me poser longtemps la question. Je pénètre dans la maison. Soudain il fait sombre, le plafond est très bas et malgré ma très petite taille je dois me courber. J’ai soif, où puis-je trouver de l’eau? Aucun clapotis ne retentit à mes oreilles. 

Je suis seule. Il me reste un peu d’eau dans ma gourde. Je m’assois et je m’endors. 

Un grand vacarme me réveille en sursaut. La maison tremble, elle va tomber. Je me précipite au dehors. Un homme en short et T-shirt est aussi surpris que moi. «Que faites-vous là?» «Dépêchez-vous, poussez-vous, on va tourner dans un instant, il faut que l’on déplace le décor.» 


Catherine

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